• Le seul côté sympa avec cette opération c'est que je passe pour une sorte de héros. S'imaginer le poitrail béant avec un mec qui trifouille là bas dedans fiche la trouille à beaucoup de gens et me voir en forme menant une vie normale 2 mois après en impose ! En plus par honnêteté j'en minimise la douleur et la gêne par rapport à l'idée qu'on s'en fait.Ce qui fait, genre : il minimise parce qu'il est super courageux.

    J'ai même (presque) la nostalgie de mes 3 semaines en centre de rééducation. Pas de souci, je n'avais à m'occuper que de moi même, j'organisais ma journée en fonction des impératifs sportifs et des repas pour le reste c'était quartier libre: bouquiner, un peu de télé, balade tranquillou, poker sur le téléphone, aller boire un chocolat chaud, discuter de ci de là, quelques visites... Le personnel agréable, serviable, essentiellement jeune et féminin. Période légèrement ennuyeuse mais non sans charme.

    C'est bizarre à écrire mais je me suis aimé pendant toute cette épreuve ! J'étais bosseur, sympa avec tout le monde, modeste. La force tranquille.

    Interdit aux moins de 16 ans :

    Tout est revenu plus ou moins rapidement, la faim, digérer, uriner, faire ses besoins, dormir sans somnifère... sauf la bandaison ! Comme dit Georges ça ne se commande pas. Entre l'opération et la 1ère érection il s'est bien écoulé 15 jours. Je suis passé de 0, le néant total, à de légers frémissements avant que Mr Popaul daigne se redresser. Je regardais des vidéos cochonnes pour titiller Popaulounet rien ! Queue de chie si j'ose dire. Et puis c'est revenu...

     

     


  • Tout d'un coup j'ai eu une illumination,j'ai inventé une méthode pour ne pas trop flipper quand on a une épreuve à franchir : se faire (artificiellement) tout un monde de la partie la plus anecdotique de l'épreuve pour se rendre compte que ce n'était rien et encaisser la suite avec détachement. 

    Je testerai quand j'aurai la cataracte. Parce que le tuyau dans le gosier à côté de me tripatouiller un œil c'est de la gnognotte. Là c'est carrément phobique ++.

    Le pire ce serait qu'on me trifouille un œil après m'avoir mis un tuyau dans la gorge tout en passant un irm du cerveau. Oui je suis aussi phobique ++ de l'enfermement.

    A part ces 3 petites faiblesses je crois que ça va. Je crains ni les pigeons ni l'avion.

    Ah si ! Être perdu tout seul la nuit au fond des bois ! Surtout si un loup veut m'introduire un truc dans la gorge en me triturant un œil.

     

     

     


  • Je m'étais imaginé me réveillant fatigué, douloureux et faiblard. Ce qui était vrai mais ne reflétait pas mes sensations intimes. Cela ressemblait plus à une re naissance comme si j'étais un bébé qui allait tout apprendre à très grande vitesse.

    Le langage je l'avais mais pas avec des idées très claires et une difficulté à dire plus de quelques mots car j'étais très essoufflé.

    La marche c'est revenu dès que j'ai été débarrassé de tout l'attirail. J'ai fait quelques pas avec une kiné. C'était plutôt amusant, je faisais des pas de 30 cm et je ressentais un léger déséquilibre.

    Comme déjà dit la faim est arrivée le 4ème jour au matin. Moi qui, si je ne fais pas gaffe, mangerais 5 fois par jour, j'avais zéro appétit.

    Bon bref sans entrer dans les détails les petites choses courantes de la vie sont revenues progressivement. Ah tiens ! C'est mon premier éternuement.

    Comme j'avais peu de douleur à gérer quand on m'a basculé sur un autre médoc que la morphine qui me donnait des nausées et que j'ai repris des forces en mangeant je regardais tout ça avec une certain détachement.

    C'est une façon, que je vous souhaite pas, d'apprendre à se connaître, de découvrir des forces qu'on a en soi qu'on ne soupçonnait pas.

    A l'instant, pile 2 mois après l'opération, je peux dire que j'ai récupéré 95% de mes capacités qui ne sont pas celles d'un sportif de haut niveau !

    J'ai perdu 3 kg dans l'aventure j'en ai repris 1. J'ai revu le généraliste ce matin. Tout est impec à priori.

    Bon j'espère que je suis pas trop casse couilles avec mes histoires ! Je me dis que si tu es arrivé jusque là et qu'un jour tu dois vivre ce genre d'évènement ça devrait contribuer à te rassurer.

     


  • Je me réveille  doucement en salle de réa. J'ai aucune idée de l'heure ni du jour. Ce sera J+1. Et le soir même je retrouverai ma chambre. Ou plutôt une chambre. On me trimballe dans un lit et on m'installe côté fenêtre dans une chambre double vide. Je serai seul quelques jours ce qui n'est pas plus mal.

    Je ne saurai jamais si je l'ai rêvé ou pas. En me réveillant, mais encore dans le coaltar,  j'ai entendu l'anesthésiste, en parlant de moi, dire un truc dans le genre : on va lui enlever le tuyau d'oxygène il craint vraiment d'après ce qu'il m'a dit.

    Je n'ai rien senti de ce qui me faisait le plus flipper à part une irritation pendant quelques jours à la gorge. J'ai vaguement senti qu'on m'enlevait quelques chose par le gosier mais en douceur sans douleur aucune.

    Je crois que délivré de ce poids plus psychologique que réel j'ai pris toute la suite avec sérénité. J'avais fait le plus dur !

    J'étais bardé de divers équipements : monitoring pour suivre le rythme cardiaque, un pacemaker externe, grande découverte pour moi, je ne savais pas que ce truc existait, deux drains, une sonde urinaire, une perfusion ou deux je ne me souviens plus pour me nourrir et pour les médocs.

    J'ai gardé assez longtemps le moniteur que je pouvais débrancher moi même  et le pacemaker que je trimballais dans une pochette autour du cou pour me balader dans les couloirs ou aller aux divers examens.

    Le reste m'a été enlevé dès que possible.

    Je dois dire que j'en ai bavé seulement 3 jours car j'avais des nausées, ne pouvais rien avaler et je faisais des malaise vagaux à répétition.

    Au milieu de la 3ème nuit j'ai senti que j'avais faim. J'ai pris mon premier petit déj depuis 4 jours et c'était reparti comme en 14.

    Justement on était le 14 et j'ai fait mille pas dans les couloirs ! Soit 750 m. Un exploit.

     


  • En fait, mon plus mauvais souvenir c'est la veille de l'opération. J'ai dû arriver à l'hosto en début d'après midi, donc à J-1, pour un examen préalable supplémentaire. Ma femme m'a emmené, puis je lui ai dit de me laisser c'était bon, juste un truc de routine et puis j'étais sur les rails pour enchaîner avec l'opération.

    Après son départ, une infirmière m'explique le déroulé des évènements : douche à la bétadine comme je referai le lendemain et rasage du torse, ventre et pubis car ils allaient passer par l'artère fémorale qui est au niveau de l'aine et ce serait fait pour l'opération.

    J'ai revêtu, déjà !, un habit de papier mais mauve et j'ai attendu. Un type est venu me chercher avec une chariotte et m'a descendu du 5ème au sous sol. Je pouvais marcher mais j'ai supposé que c'était la procédure et que je serai moins allant pour le retour.

    J'allais passer une coronarographie ! Rien que dire le nom sans se tromper est un calvaire. Injection d'un produit opaque ou luminescent, j'en sais rien, mais qui permettrait de voir l'état de mes coronaires, petites artères qui irriguent le cœur depuis ma nouvelle pote l'aorte.

    D'ailleurs j'y songe c'est quand même couillon de faire connaissance avec Madame Aorte seulement en découvrant qu'elle avait un souci. Mais bon c'est comme ça pour tout : j'ai découvert Messieurs Rein le jour où j'ai eu des coliques néphrétiques ou Madame Prostate quand j'avais besoin d'aller pisser touts les deux heures...

    Le toubib me fait d'abord une piquouse anesthésiante puis s'active à m'envoyer son produit miracle par Mademoiselle Fémorale. Je sens pas trop l'ambiance entre le toubib et les infirmières qui l'assistent.

    Je ressens 3 ou 4 fois une douleur soudaine quand le gars trifouille dans l'artère. C'est supportable mais désagréable. Le gars commente en regardant les images sur l'écran. Moi poliment et par réflexe je relève la tête pour mieux entendre et le regarder : le mec m'engueule. " Ne bougez pas !" Le ton n'est pas très courtois.

    Je dois dire que j'ai côtoyé une cinquantaine de personnes différentes, peut être plus, en un mois et c'est le seul qui a été désagréable.

    Je sens que la tension monte, le mec est énervé, soit il s'est levé du pied gauche soit il est irascible de nature. Il est agressif avec ses deux aides, pas cool du tout. Comme je fais gaffe à ne plus bouger ni décoller la tête, je ne vois pas ce qu'il se passe mais l'une donne quelque chose qui ne correspond pas à ce qu'il a demandé, il gueule et le balance sur la table d'examen entre mes jambes.

    L'exam terminé, il me fait un point de compression avec un gros coton, il appuie très fort. Puis un deuxième. Je comprends que le moment est délicat, j'imagine qu'avec une artère ouverte on doit se vider assez vite. Le mec est de plus en plus brusque. Arrive l’emmaillotage avec un large sparadrap qu'il va m'entortiller du ventre à la cuisse puis par la fesse droite.

    L'infirmière ne place pas le ruban comme il voudrait, il rouspète : noooon pas en travers !  Parallèle... Puis il m'empoigne la cuisse pour m’enrubanner. Une vraie brute.

    Il s'en va. Je glisse en aparté à l'infirmière : c'est une vraie brute le docteur...

    Le brancardier me remonte en chariot et me demande si j'ai eu mal. Je lui répond que oui c'est un peu douloureux. Il me dit que je ne suis que le deuxième a avoir ressenti une douleur. Tous les autres qu'il trimballe ont trouver l'examen indolore. Je lui dit que le toubib est très brusque. Je suis tombé sur un mauvais jour répond-il philosophe. Je gonfle ses statistiques sur le nombre de chochottes !

    Je vais passer la nuit avec ce ruban adhésif qui me comprime la cuisse et la fesse et maintient ma jambe droite fléchie. Mais bon je suis en forme, plutôt amusé par la séquence et je me dis que ce qui m'attend va être d'un tout autre acabit.

    Ce en quoi j'ai en partie tort...